Samedi soir, j'ai bien avancé dans mon travail sur moi, avec l'aide de cherettendre qui m'a poussée dans mes derniers retranchements pour me faire avouer à moi-même la cause du mal-être, que je traîne depuis quelques mois.
Je le savais, mais n'avais pas conscience de la force avec laquelle ce désarroi me déstabilisait et me minait jusqu'au plus profond de mon être : j'ai honte de mon travail.
J'ai l'impression d'être une fonctionnaire planquée, qui n'a rien à foutre pendant ses journées.
Ouf ! Je l'ai dit !
Autant cette situation (non désirée) me mine, autant j'ai, en plus, honte de l'avouer et le dire autour de moi, face à des personnes ramant pour joindre les deux bouts, ou rêvant tout simplement de trouver un travail.
Je comprends tout à fait qu'elles n'acceptent pas cet état de fait, voire me conspuent pour mes présumées incompétence ou fainéantise.
Pourtant, Dieu sait que je désirerais avoir réellement un travail gratifiant à faire !
Ma fiche de poste détaille que je dois accueillir le public, répondre au téléphone, faire du secrétariat et ranger les publications et autres documentations à l'attention du public et des personnels.
En réalité, il m'arrive de passer des journées entières sans que je ne voie le moindre monde, ne doive répondre au téléhone ni ne reçoive de courrier.
Je m'emmmmmmmmmmmeeerrrde !
J'en suis arrivée au point que, lorsque je reçois des documentations pour les collègues, je n'ai même plus envie de les ranger, sachant qu'elles ne serviront jamais à rien, et attendront sagement dans leur berceau d'être remplacées l'année suivante : internet est plus rapide, et tous les formateurs ont maintenant leur site, mis régulièrement à jour.
Sans parler que les écoles de Lille, Nice ou les universités canadiennes ne sont guère demandées dans notre région.
Ou plutôt, ceux qu'elles intéressent éventuellement sont suffisamment motivés (et équipés) pour entreprendre leurs recherches eux-mêmes.
Le pire est que je m'aperçois que, dans le domaine de l'orientation (dont j'ignorais tout), existent plusieurs structures parallèles qui se partagent le même public qui, lui-même, va de plus en plus pêcher ses informations sur la toile et par conséquent n'imagine même pas que nous puissions avoir un intêret quelconque :
- les Missions locales, dépendant des collectivités territoriales et destinées aux jeunes de 16 à 25 ans uniquement, et qui les orientent vers des formations et des emplois.
- les CIO (centres d'information et d'orientation), dépendant de l'Education nationale, qui (ré)orientent le public (principalement des scolaires, mais il est ouvert à tous) vers les formations qui lui conviennent.
- le Pôle emploi (anciennement ANPE), dépendant du ministère du travail, destinées aux demandeurs d'emploi et chargé de leur trouver là aussi emploi ou formations.
- sans parler des structures privées,quelquefois mandatées par les organismes ci-dessus pour faire leur travai en sous-traitance (bilans de compétences, dossiers de VAE-validation des acquis de l'expérience...).
Je conçois tout à fait (et suis totalement d'accord) que le gouvernement veuille réunir ces différentes instances qui, pour le même but, emploient 3 fois plus de personnel, ont pratiquement le même fonds documentaire et surtout, se renvoient les unes les autres le public, qui n'en demande pas tant.
Pour en revenir à mon poste, je suis arrivée là à la suite de la fermeture de mon poste précédent, distribuant par là-même le travail que je faisais (à temps plein, et sans avoir le temps de m'ennuyer) entre mes deux collègues restants, tout en leur adjoignant en plus un travail supplémentaire.
Un comble !
Alors que la structure dans laquelle je travaille survit, avec de moins en moins de fréquentation...
J'ai appris par la suite que plusieurs de mes collègues d'autres villes étaient dans le même cas, certain(e)s n'hésitant pas à emmener du repassage (du repassage !) à faire pendant leurs heures de travail.
Celui que je remplace, parti en retraite, emmenait quant à lui des magazines ou des livres.
Je me contente, avec mauvaise conscience, de surfer sur le net ou de jouer, pendant de longues heures, au solitaire.
Je sais que c'est un scandale, que je suis payée à ne (presque) rien faire !
Et pour moi, qui fut élevée dans le culte du travail et qui a été, avec mon mari, à la tête d'entreprises, c'est d'autant plus difficile à vivre.
Les amis auxquels j'ose en parler me disent qu'au contraire je dois en profiter, en me disant que je n'ai pas demandé (mais qu'on me l'a imposé), et que je peux bien me reposer maintenant à mon tour.
Car il est vrai qu'ici je suis passée d'un extrème (par exemple : 2 temps complets réunis en un seul, sans aucune formation, ni aide, sur un précédent poste) à un autre.
Mais lequel est vraiment le plus fatiguant, usant, stressant ?
Je ne saurais, en toute conscience, départager ces deux situations.
Je le fais, mais avec une très mauvaise conscience, et je m'aperçois que j'ai de moins en moins d'estime de moi-même : je n'ai plus d'énergie ni de volonté, même à la maison, comme si je me renfermais sur moi-même et ma pseudo-fainéantise.
Je me sens comme engluée dans un vide abyssal : où vais-je errant ainsi ? Quel est l'intérêt de mon travail ?
J'ai fait une requète il y a quelques jours, pour enfin sortir de cette torpeur anesthésiante...
Peut-être est-ce le début d'une réponse, cet aveu public enfin consenti ?