Certaines de mes réactions face à des situations précises m'ont fait me pencher sur les raisons de ces réflexes, et ce faisant, je me suis rendue compte a posteriori des traumatismes subis pendant mon enfance.
Oh ! Traumatismes involontaires de la part de mes parents, qui m'aimaient profondément, mais traumatismes quand même, induits par leur mode d'éducation.
Et en réfléchissant, je me suis rendue compte de l'extrème violence avec laquelle nous éduquons nos enfants (moi y compris, et je vous assure que je regrette cet état de fait).
En effet, dans notre société,
nous ne considérons pas nos enfants comme des personnes conscientes et méritant notre respect, mais comme des "sous-êtres" à qui nous devons tout apprendre.
D'ailleurs, pour certains, leurs enfants sont des
jouets soumis à leurs caprices (regardez les petites filles habillées comme des poupées...) et à leurs volontés, comme des poupées décérébrées et incapables de libre arbitre.
Pour d'autres, ce sont les
projections d'eux-mêmes : conscients de la souffrance subie pendant leur enfance, ils feront tout pour l'éviter à leurs enfants, allant jusqu'aux extrèmes opposés.
Ils peuvent être également
leur revanche dans la vie : les enfants
doivent réussir à leur place (mes parents voulaient que je sois ingénieur, métier flou par excellence pour moi), faire le métier ou le sport dont ils rêvaient et que la vie (ou leurs parents) les ont empéché de faire.
Pour la plupart, ce sont de
petits êtres dépourvus de personnalité à guider fermement sur le bon chemin, parfois très fermement.
La révolution de 68 a érigé un autre modèle : la liberté totale,
l'enfant copain, voire roi maintenant, auquel il ne faut surtout pas mettre de limites ou refuser la moindre chose de peur de le brimer.
Conception bien à l'opposé de notre éducation : nous n'avions pas la parole, les parents étant tout-puissants et omniscients.
Sans aller jusqu'à ne pas parler à table ou demander la permission pour le faire (je vous assure que c'était courant), l'enfant que j'étais n'avait pas intêret de trop l'ouvrir : on apprenait à écouter, et certains sujets ne nous concernaient pas, même s'ils étaient évoqués devant nous.
Mais, dans tous ces cas de figures, je m'aperçois que, en aucun cas, il n'y avait de respect pour les enfants.
Et je ne parle pas du respect de leur intégrité physique, qui était présent (évidemment, je ne parle pas des déviants), mais du respect de leur personnalité.
Nous
éduquons toujours nos enfants comme de petits animaux en leur assénant des règles, à apprendre par coeur, sans
forcément jamais raison donner ("ne parle pas la bouche pleine", "tiens-toi droit à table"...).
Nous leur octroyons également des libertés pour mieux les reprendre la minute suivante ("tais-toi, tu ne sais pas ce que tu dis"...).
Certes, nous faisons de notre mieux, en faisant comme nos parents ou en suivant les modes d'éducation en application (voir ci-dessus), l'esprit libre et dégagé de tout questionnement.
Et c'est en se penchant sur les résultats
de l'éducation reçue pendant notre enfance que nous pouvons nous rendre compte de ses effets néfastes.
Non, je ne prône pas un retour à la liberté totale, seulement je pense que personne ne nous apprend à éduquer correctement nos enfants, que ce n'est pas inné, que nous reproduisons les comportements qui nous ont fait souffrir ou justement leur inverse bref, que nous bricolons un mode d'emploi plus ou moins aléatoire.
Heureusement, les enfants sont plus souples qu'il n'y paraît et la majorité se sort sans encombre de cette période.
Mais en êtes vous si surs ?
N'avez-vous pas, en vous, des croyances héritées de cette période et enfouies au plus profond de vous et qui vous pourissent la vie quand elles réapparaissent ?
N'avez-vous jamais subi une bouffée d'angoisse, ou la montée de larmes intempestives à l'écoute de reflexions, qui vous ramenaient à l'époque où vous vous sentiez ignorés, niés, rejetés... ?
Le contraire m'étonnerait.
N'avez-vous jamais entendu, quelquefois du bout de l'oreille, mais le plus souvent asséné avec violence : - tu n'es bon à rien
- tu es une souillon
- que tu peux être fainéant
- tu es nul
- regarde/je préfère ton frère/ta soeur/ton ami/ton voisin
- lui/elle au moins, est ... bon à l'école, travaille, est beau/belle, a réussi, a des amis, est propre....
- tu mériterais de dormir dans la niche du chien, être enfermé dans la cave...
- tu finiras par... être balayeur, dormir sous les ponts...
- tu es comme ton père/ta mère/ton grand-père/ta tante... un(e) bon(ne) à rien, fainéant(e), rêveur... - tu me feras mourir
- c'est de ta faute si...
Rappelez-vous ces petites phrases assassines et ce que vous avez ressenti, et ressentissez encore quand quelqu'un ou quelque chose appuie sur ce petit bouton-là, bien caché et qui vous ramène des décennies en arrière, quand le parent dieu vous prédisait ce qui allait vous arriver, et auquel vous croyez encore, du fond de votre âme d'enfant...
A nous autres parents, il faudrait apprendre l'éducation dans le sens le plus noble du terme afin, qu'au lieu de rabaisser nos enfants, nous puissions les élever pour leur donner toutes les chances que nous voulons leur apporter.
Et la nature humaine étant ce qu'elle est, c'est souvent le contraire que nous distillons, par suite de nos propres traumatismes...
Et le pire est que nous faisons cela sans même nous rendre compte du mal que nos faisons, malgré tout notre amour pour
nos chers petits monstres notre progéniture.
Seulement nos propres ombres ressurgissent et nous nous mettons dans la peau du parent-roi, à notre tour...
A nous de prendre conscience de cette part d'ombre, de l'éclairer et de nous en guérir, afin d'éviter de faire une autre génération de victimes.